Allaiter un bébé en couveuse

S'il y a bien une chose que je voulais plus que tout au monde,
c'est donner mon lait à mon petit bébé, dans sa couveuse.
Tant pis s'il le recevait par "gavage", avec une sonde dans l'oesophage,
passant par son nez, sa ration dispensée au pousse-sereingue,
calculée selon des pseudo-tables très savantes...

Au moins, ce serait MON lait, pas du lait "chimique" !

[Table des matières]

Les premiers jours

Exprimer le colostrum

Tirer son lait

Attention aux tétines et aux biberons !

La première tétée

La première "vraie" tétée

De retour à la maison

 

S'il y a bien une chose que je voulais plus que tout au monde, c'est donner mon lait à mon petit bébé, dans sa couveuse. Tant pis s'il le recevait par "gavage", avec une sonde dans l'oesophage, passant par son nez, sa ration dispensée au pousse-sereingue, calculée selon des pseudo-tables très savantes... Au moins, ce serait MON lait, pas du lait "chimique" !

Plus tard, j'ai réalisé que les têtées, même très réglementées (pesée avant - après, heure fixe, durée limitée), nous permettaient d'avoir de très beaux moments, très tendres et très intimes, malgré l'environnement qui, lui, était loin de l'être. En fait, c'étaient les seuls moments de liberté pour mon bébé. Une demi-heure sans capteurs, sans gavage, où il déterminait lui-même ce dont il avait besoin.

Enfin, une fois de retour à la maison, l'allaitement nous a véritablement "racommodées moralement". Notre séparation, aussi dure qu'elle fut, n'était pas irréversible, puisqu'elle n'avait pas été jusqu'au sevrage. Tout était à reconstruire, et tout était possible. J'avais toujours eu confiance en les capacités de mon bébé. Et maintenant, nous étions LIBRES de nous aimer, de nous toucher, et l'allaitement était la consécration de notre bonheur retrouvé.

Les premiers jours

Si votre bébé est dans un état de santé ou de poids satisfaisant, il est très possible que l'on vous laisse l'allaiter au centre néo-natal, ne fut-ce qu'une fois par jour. Profitez de cette opportunité, et demandez-le le cas échéant. Cette "vraie" têtée peut vraiment aider, moralement surtout, à entretenir votre lactation, même si, en plus, vous devrez tirer votre lait.

Toutefois, il existe de nombreux cas où le bébé ne peut pas téter, soit parce qu'il est trop faible, soit parce que l'on ne vous y autorise pas (aussi révoltant que cela paraisse, cela arrive... voir mon témoignage). Faites confiance à votre bébé : le jour viendra où il pourra et où il saura téter. Mais dans l'intervalle, il faut démarrer et stimuler votre lactation.

Exprimer le colostrum

C'est une accoucheuse qui m'a aidée à démarrer cette lactation que je pensais impossible, sans bébé au sein. On m'avait donné une sereingue en plastic, pour tirer le colostrum, si je voulais... Au lieu de tirer le lait AVEC la sereingue, il faut exprimer manuellement le colostrum, par une sorte de massage du sein et du mamelon, et le faire couler DANS la sereingue, munie d'un bouchon. Cela paraît simple, mais c'est mieux quand une sage-femme le fait pour la maman, qui peut alors essayer de se détendre et penser très fort à son bébé. Les quantités sont faibles (5 à 20 ml), car le colostrum est un lait très concentré. C'est aussi le plus riche pour le bébé : anticorps, sels minéraux, etc.

Comme le colostrum évolue à chaque "têtée", il est important de bien dater les sereingues, afin de les donner dans l'ordre, si le bébé doit rester à jeun, sous perfusion, quelques jours.

Après un ou deux jours, le colostrum se transforme peu à peu en lait. Il est plus blanc, plus liquide, et les quantités augmentent. On peut alors utiliser un tire-lait (théoriquement, on peut utiliser le tire-lait pour exprimer le colostrum, mais on risque de perdre une partie de ce précieux lait dans l'appareil, d'où le conseil de l'extraire d'abord manuellement).

Tirer son lait

Pour le choix du tire-lait, pas d'hésitation possible : allez ou envoyez votre compagnon acheter un tire-lait manuel AVENT. N'essayez rien d'autre ! Ce site n'est pas sponsorisé par AVENT, mais toutes les autres méthodes et machines (en particulier, celles qu'on donne en maternité) risquent juste de vous décourager, à court ou moyen terme.

Il n'y a pas de règle ou de norme pour tirer son lait : ni quantité, ni durée standard. Par exemple, on peut tirer un sein à la fois, toutes les trois heures (sauf en pleine nuit !), pendant 10 minutes. Ou les deux seins, toutes les quatre heures, en cas de baisse de lactation par exemple. Le mieux est d'essayer de suivre le rythme et les quantités qui sont dispensées au bébé, le plus souvent par "gavage".

Avant de commencer à tirer votre lait, asseyez-vous confortablement, dans un endroit chaud, où vous ne risquez pas d'être dérangée. Ayez près de vous une bouteille d'eau minérale et, pourquoi pas, un objet ou une photo qui vous font penser à votre petit bébé. Par exemple, vous pouvez vous mettre autour du cou un foulard que vous lui donnerez, chargé de votre odeur rassurante, pour son lit ou sa couveuse.

Quand le tire-lait provoque bien la montée de lait, on sent, après 10 à 50 secondes, des picotements dans les deux seins, et le lait vient d'un coup, en "grandes" quantités. Ensuite, le flux diminue, et le lait semble changer de texture : il est en fait plus gras en fin de "têtée". Il ne faut pas négliger ces dernières gouttes, qui sont les plus riches pour le bébé.

Si le lait reste tout clair et en faibles quantités dans le réceptacle (10 à 20 ml), il se peut que la montée de lait ne se soit pas produite. Ne paniquez pas, ça arrive quand on est fatiguée, triste (par exemple si bébé est remis sous perfusion, privé de lait un certain temps) ou inquiète d'être dérangée. Vous aurez encore du lait, ne vous inquiétez pas, la lactation ne s'arrête pas "comme ça". Quelques trucs pour stimuler la lactation : un bisou du papa (sur le sein), prendre son bébé sur soi (quand c'est permis !), faire de longues respirations relaxantes (comme en yoga), dormir un peu... Et réessayer une heure ou deux plus tard.

Attention aux tétines et aux biberons !

Si c'est un tout petit bébé, il vaut mieux qu'il soit nourri avec un sonde gastrique (par le nez) que par biberon, dont la tétine risquerait de lui faire perdre le réflexe de succion au sein. En effet, le bébé "pince" la tétine du biberon et le lait coule. Au sein, il faut simultanément lécher l'auréole et déglutir, chose que nous, adultes, sommes incapables de faire, preuve que nous avons perdu ce réflexe.

De même, il vaut mieux éviter de lui mettre en bouche une tétine, qui est bien souvent un bout de biberon collée sur un manchon en tissus. Collez une pancarte sur la couveuse si nécessaire !

La première tétée

Il m'a fallu attendre 17 jours avant de mettre, pour la première fois, mon bébé au sein. Les conditions d'intimité et de confort n'étaient pas optimales, loin de là, mais cela m'importait peu. Assise au milieu des couveuses et des alarmes, sur ma chaise bien dure, face à la vitre où déambulaient les visiteurs, me voici avec bébé.

J'étais remplie de peur et de joie à la fois, un peu (ne riez pas) comme une jeune fille qui ferait l'amour pour la première fois. Arrivait enfin ce moment extraodinaire, pour lequel j'avais tant lutté. Pour moi, c'était bien plus un moment d'amour qu'un geste "alimentaire".

Je voulais que personne ne gâche notre découverte mutuelle."Je n'ai pas besoin d'aide, mon bébé sait bien ce qu'il doit faire". Eh bien, pour sa première têtée, ma petite Joséphine a... dormi de tout son saoul. Ce n'était pas son moment, voilà tout. Je n'étais pas déçue, car c'était à elle seule de décider. Sauf que je ne pourrais pas recommencer avant le lendemain...

La première "vraie" têtée

Cette fois, j'ai mis mon orgeuil en poche et accepté l'aide d'une infirmière pour la première mise au sein. "Allez, on ouvre une grande bouche" dit-elle en poussant sur les joues de Joséphine et en la plaquant contre mon sein. Pas très romantique, mais cela semble efficace. Je vois sortir une petite langue qui lèche le dessous du mamelon. J'explose de lait... et de bonheur (mais j'attends que l'infirmière s'éloigne pour le partager uniquement avec mon bébé).

Il est vrai que, chez de tout petits bébés, qui n'ont jamais utilisé leur bouche pour manger (!), le réflexe de succion au sein peut parfois être un peu "oublié". Il y a également des tout petits, qui sont encore un peu faibles, et avec qui il faut débuter pas à pas, gorgée par gorgée. Ne vous découragez pas, même si les pesées avant / après sont comme des verdicts culpabilisants : "il n'a pas "pris" assez"... Il faut garder confiance en vous et en votre bébé. La balance, les tétées à heure fixe, à durée limitée et en nombre contrôlé sont autant d'ennemis de l'allaitement. Rien de tel, en effet, que l'allaitement à la demande.

Hélas, les protocoles et les horaires des hôpitaux semblent faire bien peu de cas du rythme naturel des petits bébés. Courage, il faudra passer par là et tenir bon jusqu'à la sortie. Entretemps, le maître-mot est "CONFIANCE" ! Ne croyez pas la balance : ce n'est pas vous qui n'avez pas assez de lait, ni bébé qui ne "sait pas" boire. C'est simplement que le rythme imposé ne lui convient pas. On lui impose 8 repas, mais s'il était "librement" au sein, comme dans la méthode kangourou colombienne, il en ferait peut- être 12, 16, voire plus... Chaque bébé a son rythme et ses besoins, et aucune "table" ni "norme" ne peut les connaître mieux que lui !

De retour à la maison

Enfin libres ! Cette fois, vous pouvez allaiter bébé autant de fois qu'il le souhaite. Surtout ne vous privez pas. Vous ne le rendrez pas "difficile", bien au contraire, et il n'y a rien de meilleur pour lui que l'allaitement à la demande !

Et surtout, OUBLIEZ LA BALANCE !!! C'est vrai qu'au sein, on ne "voit pas" ce qu'il "prend"... Mais la Nature se moque des grammes. Elle a simplement tout prévu pour que votre bébé (ou vos jumeaux) boive toujours en fonction de ses besoins.

Surtout, ne laissez pas la moindre boite de lait en poudre pénétrer dans votre maison. Vous aurez toujours du lait si vous ne donnez pas de complément. Un petit conseil : ne rechignez pas sur les siestes en même temps que bébé, laissez-le dormir près de vous (c'est moins fatiguant que de se relever la nuit), ne comptez pas les tétées et... faites-vous encourager par le Papa !

Je vous souhaite 1001 merveilleuses tétées (au moins !). Et que l'allaitement soit la consécration de votre bonheur retrouvé !


 
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